Le présent ouvrage (Amazon.fr) accompagne les deux expositions Poussin et l’amour et Picasso | Poussin | Bacchanales, présentées au musée des Beaux-Arts de Lyon du 26 novembre 2022 au 5 mars 2023. L’exposition est organisée par le musée des Beaux-Arts de Lyon avec le soutien exceptionnel du Musée national Picasso-Paris, dans le cadre de la Célébration Picasso 1973-2023 : 50 expositions et événements pour célébrer Picasso.
Considéré dès le XVIIe siècle comme le fondateur de l’école française de peinture, Poussin est aujourd’hui célèbre pour ses tableaux austères, où la rigueur des lignes le dispute à la profondeur des sujets. Beaucoup ignorent que Poussin fut à son arrivée à Rome en 1624, et même dès avant, un peintre poète conteur de la toute-puissance de l’amour, du bonheur qu’il inspire et des souffrances qu’il inflige. Rares sont les peintres à avoir traduit avec une touche aussi libre et sensuelle et dans des compositions aussi audacieuses l’érotisme des corps, les plaisirs de l’ivresse et l’intensité des désirs. Rares sont ceux à avoir fait du thème de l’amour le fil conducteur de leur œuvre: Poussin s’y emploie depuis La Mort de Chioné de Lyon, son premier tableau connu, peint vers 1622, jusqu’à sa dernière peinture, l’Apollon amoureux de Daphné du Louvre, ultime méditation sur l’amour à l’heure de la mort. Au fil de plus d’une cinquantaine d’œuvres, c’est à ce Poussin méconnu, voire interdit, que cet ouvrage (Amazon.fr) rend hommage.
La partie Poussin et l’amour a été créée sous la direction de Nicolas Milovanovic, conservateur en chef du patrimoine, département des Peintures, musée du Louvre, Mickaël Szanto, maître de conférences Sorbonne Université (Faculté des lettres), Centre André Chastel et Ludmila Virassamynaïken, conservatrice en chef du patrimoine, en charge des peintures et sculptures anciennes, musée des Beaux-Arts de Lyon – Avec les textes de Pierre Rosenberg, Alain Mérot, Nicolas Milovanovic, Ludmila Virassamynaïken, Patrizia Cavazzini, Henry Keazor, Hidenori Kurita, Elise Kerner, Elinor Myara Kelif, Clélia Nau et Mickaël Szanto.
Le catalogue Poussin et l’amour, sous la direction de Nicolas Milovanovic, Mickaël Szanto et Ludmila Virassamynaïken, décembre 2022, brochée avec rabats, 368 pages avec 285 illustrations, 25 x 28 cm, est une coédition du Musée des beaux-arts de Lyon avec In Fine éditions d’art. Commandez ce livre chez Amazon.fr.
En 2007, le musée des Beaux-Arts de Lyon acheta La Fuite en Égypte de Nicolas Poussin. Dernier tableau connu de l’artiste encore en mains privées en France, il fut classé trésor national en août 2004 et acquis pour le musée de Lyon par le concours de fonds publics et privés réunis grâce aux efforts conjugués du musée du Louvre et du musée des Beaux-Arts de Lyon. En 2008, le musée des Beaux-Arts de Lyon a consacré une exposition à ce tableau qui appartient à la période tardive de l’artiste, permetant d’explorer ses différents aspects.
L’achat en 2016 de La Mort de Chioné de Nicolas Poussin fut un évènement tout aussi exceptionnel: le tableau classé œuvre d’intérêt patrimonial majeur fut acquis avec le concours du Club du musée Saint-Pierre dont certains mécènes avaient déjà participé à l’acquisition de La Fuite en Égypte, du fonds du Patrimoine, de la Région Auvergne-Rhône-Alpes et de la Ville de Lyon. La présence de La Mort de Chioné dans l’inventaire après décès des biens de Silvio II Reynon – tableau réapparu à Londres en 1995 et atribué à Poussin par Pierre Rosenberg et Denis Mahon – est venue étayer l’hypothèse d’un long séjour lyonnais de l’artiste entre 1619 et 1622, ayant donné lieu à des commandes. Poussin peignit ce tableau fascinant très vraisemblablement alors qu’il séjournait à Lyon, vers 1622, pour le soyeux lyonnais Silvio I Reynon. L’acquisition de ces deux tableaux de Poussin a permis de renforcer la collection de peintures françaises du xviie siècle du musée des Beaux-Arts de Lyon, une des plus importantes en France. Ce fonds comporte des œuvres majeures de Simon Vouet, d’Eustache Le Sueur, de Philippe de Champaigne ou encore de Charles Le Brun.
Dans la préface du catalogue, Sylvie Ramond écrit que l’exposition Poussin et l’amour entend révéler un Poussin méconnu du grand public, un peintre poète qui célèbre l’amour alors qu’il est considéré avant tout comme un peintre philosophe, le maître austère de l’école française. Il s’agit de rappeler que l’artiste s’est aussi adonné au pur plaisir de peindre dans des tableaux sensuels, voire érotiques qui ont, pour certains, été jugés si provo-cants qu’ils ont été découpés ou détruits dès le XVIIe siècle. A son arrivée à Rome, Poussin peint pour des amateurs romains des tableaux extrêmement sensuels qui témoignent de son admiration pour la peinture du Titien (vers 1488-1576) dont il a pu admirer les créations majeures dans la Rome des années 1620. Qu’il peigne Vénus ou des nymphes, Les Métamorphoses d’Ovide lui inspirent des œuvres dont le motif principal est le corps féminin et le désir qu’il suscite. A la fin de sa vie, le peintre poète propose finalement une méditation profonde sur la portée à la fois universelle et tragique de l’amour, illustrée notamment par l’Apollon et Daphné du Louvre et le Pyrame et Thisbé du musée de Francfort, note Sylvie Ramond.
La deuxième partie de l’exposition à Lyon et du catalogue est pensée dans la continuité de l’exposition Poussin et l’amour. Il s’agit une exposition-dossier intitulée Picasso | Poussin | Bacchanales qui propose d’interroger l’héritage de Poussin dans la construction de l’imaginaire érotique et bachique de Picasso. Entre le 24 et le 29 août 1944, Picasso exécute un dessin et une gouache aquarelle d’après Le Triomphe de Pan de Poussin. La Bacchanale de Picasso d’après Poussin s’inscrit dans un corpus de sa création particulièrement riche sur le thème du plaisir et des excès de la fêtea dionysiaque, ecrit Sylvie Ramond.
Le photographe Brassaï écrit à ce sujet dans Conversation avec Picasso, Paris, Gallimarrd [1964], 1969, pages 299-300): «PICASSO rit malicieusement et sort la Bacchanale d’un carton: La voici! J l’ai peinte «d ’après Poussin» pendant les journées sanglantes de la Libération, au mois d’août… On tirait partout Les tanks ébranlaient la maison… Je regarde la Bacchanale: un tourbillon de désir, un enchevêtrement de corps… Sur cette gouache aussi la bataille faisait rage. Tout en s’appuyant sur Poussin, Picasso, dans ces jours tragiques, a donné libre cours à son érotisme. Autour du faune barbu et de la nymphe au derrière rebondi, aux seins agressifs, c’est une mêlée, un corps à corps… Des mains et des pieds jaillissent de partout, appartenant on ne sait plus à quel corps […]»
La partie PICASSO | bacchanales | POUSSIN de l’exposition et du catalogue a été créée sous la direction de Zoé Marty, conservatrice du patrimoine, responsable du service collections, Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole et Sylvie Ramond, conservateur en chef du patrimoine, directeur du musée des Beaux-Arts, directeur général du pôle des musées d’art MBA|MAC, professeur associé à l’ENS de Lyon.
Ce catalogue est dédié à la mémoire de Charles Dempsey, éminent connaisseur de l’art de Poussin, professeur émérite au Department of History of Art de la Johns Hopkins University Krieger School of Arts and Sciences, à Baltimore (Maryland), décédé le 22 février 2022. Il rédigea avec son épouse, Elizabeth Cropper, l’ouvrage de référence: Nicolas Poussin. Friendship and the Love of Painting? Princeton University, 1996, 412 pages. Commandez ce livre (en anglais) chez Amazon.fr.
Pour faciliter la lecture, les citations et citations partielles du livre présenté ne se trouvent pas entre guillemets.
Critique de livre / catalogue ajouté le 27 février 2023 à 15:54 heure de Paris.