Un président ne devrait pas dire ça

Le jour où L’Obs à sortie une couverture avec la tête de François Hollande et le titre “Je suis prêt”, les deux journalistes du Monde, Gérard Davet et Fabrice Lhomme, ont sorti leur livre qui a définitivement coulé les derniers espoirs de François Hollande de pouvoir se représenter : “Un président ne devrait pas dire ça…” Les secrets d’un quinquennat. (commandez ce livre chez Amazon.fr; téléchargez ce livre en format Kindle chez Amazon.fr). Les anglophones disent à ce sujet: Timing is everything.

Gérard Davet et Fabrice Lhomme disent au sujet de leur livre que c’est ni biographie ni “recueil de ces fausses confidences dont Hollande a le secret”, ni analyse de sa politique. Ils avait une autre ambition : “éclairer les coulisses du pouvoir, avoir accès au dessous des cartes, être dans le secret des décisions. Comprendre, surtout.”

Gérard Davet et Fabrice Lhomme écrivent au sujet de la genèse de leur livre : “… nos entrevues mensuelles, à ‘Elysée, se tenaient le plus souvent le premier vendredi du mois, en général entre 19 et 20 heures. A chaque fois, sans conseiller ni témoin.” Ils notent: “… quelques déjeuners et, surtout, des dîners – une dizaine au total -, plus propices aux confidences”. Quant aux dîners, ils précisent: “Certains à l’Elysée, les autres à nos domiciles respectifs…” Ils soulignent qu’ils ont fait tout cela sans “entretenir des relations amicales ou complices avec le chef de l’Etat”. Ils avancent un nombre impressionnant d’entretiens avec le président de la République : “une soixantaine de rencontres”.

Beaucoup de Français se sont demandés – à juste titre – si le président n’avait pas autre chose à faire. Mon explication est simple : François Hollande aiment les journalistes, à lui même travaillé en tant que tel et, entre nous, aurait fait mieux pour la France en restant journaliste.

Gérard Davet et Fabrice Lhomme soulignent dans “Un président ne devrait pas dire ça…”  : “Nous avons aussi, essentiellement au cours des deux premières années, recueilli les confidences de proches du chef de l’Etat : Manuel Valls, Bernard Cazeneuve, Stéphane Le Foll… Avant d’être contraints d’y renoncer, au cours de l’année 2014. Dénoncés par les porte-flingues de la Sarkozie – élus, avocats, journalistes… – comme deux journalistes à la solde du pouvoir, dont les rendez-vous avec le chef de l’Etat avaient pour but de conspirer contre son prédécesseur, nous devînmes assez vite infréquentables, y compris pour de nombreux responsables politiques de gauche, convaincus que nous étions suivis, voire espionnés. Sur ce point, les faits, hélas, devaient leur donner raison…”

Nos deux auteurs nous révèlent l’objectif de leur démarche: “… écrire tout haut ce que les politiques – a fortifiori le président de la République – disent tout bas, tel était notre but.” Ils ajoutent qu’ils voulaient des témoignages “sans filtre”.

Gérard Davet et Fabrice Lhomme expliquent le titre de leur livre qui a fait scandale avec les mots suivants : “« Un président ne devrait pas dire ça, je suis enregistré… » Cette phrase, Hollande l’a lâchée, un jour où il s’emportait. Il n’aurait pas dû « dire ça ? Nous, nous devions l’écrire.”

François Hollande s’est confié à Gérard Davet et Fabrice Lhomme car, comme il a dit dans un autre contexte, qu’il considère Le Monde comme “son” journal, le journal de la Gauche. Il s’est trompé dans la mesure où les deux journalistes n’ont pas fait de concessions en nous confiant tout ce qu’il leur a raconté.

Par contre, ici et là, ils révèlent tout de même qu’ils sont de gauche. Et ils font comprendre ici et là qui ils apprécient. Un de ces moments rares livrent des propos au sujet d’Emmanuel Macron. Ils citent le président de la République : “Le plus dur, ce ne sont les gens qui vous trahissent.”Puis les deux auteurs ajoutent : “Un Macron en cache toujours en autre…”

C’est la grande thèse de la trahison d’Emmanuel Macron qu’aime répandre les gens du PS. Mais qui a trahi qui ? En fait, François Hollande et Emmanuel Valls n’ont pas laissé Emmanuel Macron faire sa réforme libéral du code de travail, la loi Macron. A la fin, ils lui ont même retiré ce projet qui a fini, dans une version édulcoré, comme loi El Khomri. Donc eux, ils ont trahi Macron d’abord.

Gérard Davet et Fabrice Lhomme nous ont fait sourire avec des fautes d’orthographe. Ils décrivent Nicolas Sarkozy comme “Dark Vador”. Dans les films Star Wars, ce personnage s’appelle Darth Vader.

“Un président ne devrait pas dire ça…” n’a évidemment pas fait couler autant d’encre à cause de cette faute, mais avant tout à cause de petites phrases assassines. François Hollande décrit notamment les écologistes comme “des cyniques et des emmerdeurs”. Il a des mots peu tendre pour des gens même de son camp, voire des fidèles. Le président de l’Assemblée, Claude Bartolone, le ministre de la Défense, Jean-Yves le Drian, ainsi que le ministre de l’Agriculture et porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, n’ont pas apprécié le livre de Davet et Lhomme. Le premier ministre, Manuel Valls, est même allé jusqu’à exprimer sa “colère” personnelle ainsi que la “honte” ressentie selon lui par les militants et les élus du PS à la lecture du livre-confessions.

Notons à la fin que les deux auteurs arrivent à la conclusion que François Hollande est un homme politique intègre, ce qui n’est pas rien si l’on se souvient des affaires de Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy.

Gérard Davet et Fabrice Lhomme arrivent à la conclusion que Hollande “n’ < imprime > pas. Strictement rien ne lui sera crédité”. Les auteurs ont raison dont la mesure où le président a quand même quelques succès à montrer, entre autres le mariage pour tous et l’intervention militaire au Mali. Mais, en somme, son quinquennat est un échec, à commencer par le taux de chômage qui se situe toujours autour de 10%, les tentatives de lois au sujet de la déchéance de la nationalité et au sujet du Burkini, l’affaire Leonarda et ainsi de suite. De surcroit, François Hollande n’a rarement été présidentiel. Seulement après les attentats, il a su tenir quelques discours qui lui ont confié la stature d’homme d’Etat. Le livre-confessions de Gérard Davet et Fabrice Lhomme n’est pas arrivé à sauver le “président normal” sur la dernière ligne droite avant la présidentielle. Au contraire, il a mis un terme aux ambitions de l’homme qui réside encore aujourd’hui à l’Elysée.

Gérard Davet, Fabrice Lhomme : “Un président ne devrait pas dire ça…” Les secrets d’un quinquennat. Stock, octobre 2016, 672 pages. Commandez ce livre chez Amazon.fr. Téléchargez le livre en Format Kindle chez Amazon.fr.

Article du 1er janvier 2017. Ajouté à 00:06 heure de Paris.