Miles Davis: Kind of Blue

Déc 03, 2008 at 00:00 903

Miles Davis “ Kind Of Blue 50th Anniversary Limited Edition ” Sony 88697335522

Miles Davis: Kind of Blue 50th Anniversary Limited Edition

Sony BMG, September 2008. Commandez ce coffret chez Amazon.com et Amazon.fr.

On ne peut pas croire que ces sessions mythiques fêteront dans quelques semaines leurs 50 ans d’existence. Déjà pourrais-je affirmer! Cette musique reste toujours si actuelle, tant par le traitement musical que par le résultat, le son et le mixage. Tout sonne si intemporel.

Et pourtant, seul le batteur, devenu une légende, Jimmy Cobb, vit encore et est parmi nous.

On dit souvent que cet album est le plus grand du Jazz moderne. Difficile à dire mais en tous les cas, il fait partie des plus grands de tous les temps, on peut en être sûr.

Je continue à me demander comment un tel album peut encore se vendre tous les jours partout dans le monde ! Tous les amateurs doivent le posséder à plusieurs exemplaires dans tous les formats possibles car même les personnes qui « aiment bien », sans être de vrais passionnés, l’ont chez eux depuis des décennies!

En tous les cas, « Kind Of Blue » reste l’album le plus vendu, le plus connu et le plus adulé de Miles Davis, et ce depuis cinq décennies.

La légende voulait que ces titres ne furent ni préparés, ni répétés, ni planifiés. Or, on sait maintenant que ce n’est qu’en partie vrai. En effet, dans ce coffret extraordinaire, le second CD nous propose des prises inédites et ou des répétitions de segments de ces thèmes, même si au départ, Miles voulu ces séances les plus spontanées en donnant un minimum d’indications.

On peut se rendre compte toutefois que la magie et le génie ont souvent comme synonymes travail, rigueur, idées bien déterminées à partager et à distribuer, même si l’on veut aller droit au but avec un minimum de notes et d’effets. C’est d’ailleurs souvent le plus difficile à réaliser.

D’ailleurs, la maxime d’Antoine-Laurent de Lavoisier (1743-1794) reste fort célèbre : « rien ne se perd, rien ne se crée ».

« So What » commence par un duo à l’unisson entre le pianiste Bill Evans et le bassiste Paul Chambers. Ces lignes sont complexes. La trame se construit sur deux notes couvrant seize mesures. Miles débute soutenu par Paul Chambers.

Les amateurs avertis entendront, dans le solo de John Coltrane, les prémices de ce qu’il enregistra plus tard et qui deviendra un de ses chefs-d’œuvre, « Impressions » (même trame harmonique !).

« Freddy Freeloader » est un blues normal de douze mesures. La particularité par contre de ce dernier est son traitement, surtout le début qui, rapidement, fut repris par de nombreux autres Jazzmen, donnant cette marque de fabrique inoubliable. C’est une des grandes forces de Miles.

« Blue In Green » est une balade avec une mélodie que je qualifierais d’épurée à son maximum. Cette composition reste très spéciale : elle apparaît comme blues certes mais le nombre de mesures sur la grille est de dix. Le choix des accords l’enrichit énormément. Avec une écoute attentive, on constate que tout le groupe semble ne pas réellement trouver ses marques ; le tout nous faisant croire à un certain flou aussi bien harmonique que rythmique. Troublant, étonnant et envoûtant!

« All Blues », devenu un standard depuis, est bel et bien encore un autre blues mais différent.

Il se joue à trois temps et est le titre le plus « enlevé » de l’album. On peut affirmer que Miles et ses hommes font une exploration du blues des plus originale et innovante. Pourquoi ? Car Miles, de plus, introduit un élément modal dans l’harmonie et qui, du coup, modifie toute l’écoute et l’approche de ce thème. Il sonne si différent.

Je pense très sincèrement que c’est surtout avec ce titre que tout l’album innove autant. Miles et ses acolytes nous donnent à entendre une façon et une approche nouvelles de jouer cette musique. Les différents modes sont ici utilisés comme bases harmoniques ; les tonalités ne deviennent « flottantes » et non plus « rigides », ce qui change complètement l’écoute des auditeurs.

« Flamenco Sketches », un autre thème modal appelé « phrygien », sur lequel on peut jouer des gammes du style dit hispanique (Espagne). A nouveau, il s’agit encore d’un autre blues, mélangé avec des racines espagnoles que nous propose ce groupe mythique. D’ ailleurs, on pourrait penser, à juste titre d’ailleurs !, que c’est à la suite de cette composition que Miles eut l’idée, une année plus tard, de réaliser, avec Gil Evans, un autre total chef-œuvre et  incontournable album : « Sketches Of Spain ».

Il faut souligner, avec attention, que le mot « sketch » signifie, en anglais, esquisse. Avec ce seul mot, on peut dévoiler une grande partie de l’art musical et pictural (voir ses peintures) de Miles Davis ; un de ses secrets de génie réside sans aucun doute ici.

Ces séances sont capitales en musique. Il innove dans l’épuration des thèmes, les esquissant à peine (car une grande partie reste l’improvisation à l’état pur), dans les différents modes comme bases harmoniques, le tout restant que sur des morceaux lents. Cerise sur la gâteau, on peut conclure et affirmer que toutes ses géniales innovations proviennent … de la tradition la plus pure et ancestrale du Jazz : le Blues ! Mais pas n’importe lequel. En effet, ils sonnent très sophistiqués et méditatifs (lents et floues) mais tous nous content toujours et encore des complaintes.

Miles Davis réfléchissait beaucoup tout le temps, malgré ce que certains osent avancer.


Miles Davis: Complete Birth of the Cool. Blue Note Records, 1998. Commandez ce coffret chez Amazon.com ou Amazon.fr (une édition best of par Jazz Track 2008).


Miles Davis: Sketches of Spain. Original recording remastered. 1959, Sony 1997. Commandez ce CD chez Amazon.com ou Amazon.fr.


Miles Davis: Complete Bitches Brew Sessions

1969. Sony 2004. Commandez ces 4 CDs chez Amazon.com ou Amazon.fr.

J’ai le droit de penser que sa façon de jouer et d’enregistrer la musique du film « Ascenseur Pour l’Echafaud » à Paris, en 1957, lui ouvrit la porte à de nombreuses nouvelles pistes musicales exploitables. Il réitérera d’ailleurs, dix ans plus tard, l’expérience avec les séances « Bitches Brew », en compagnie de musiciens plus jeunes que lui et en utilisant leurs nouveaux instruments innovants.

Pour honorer cet album « Kind Of Blue » comme il se doit, Sony-BMG sort «l’artillerie lourde» : un somptueux coffret en format LP avec le CD remixé de la séance, un deuxième CD d’inédits jamais parus officiellement, un DVD (documentaire et séances avec Gil Evans de « Sketches Of Spain » justement, un livre relié de 60 pages avec des photos fantastiques, le vinyle, ce dernier teinté en bleu, avec la pochette originale, un poster, les « liner notes » écrites à la main de Bill Evans, une enveloppe surprise avec des photos de la séance à l’intérieur.

Il faut l’avouer, cette parution est une pièce de collection unique. Le travail du son reste le meilleur jamais paru à ce jour : on y entend tous les détails, les instruments sonnent des plus claires et aérés. La qualité du livret, son tirage de toutes les photos, le poster et le vinyle sont  réalisés avec très grande classe.

Le livret est agrémenté de photos somptueuses et les textes intelligemment bien écrits. Les copies des fiches techniques sont des plus intéressantes, vues pour la première fois. De plus, le documentaire DVD reste passionnant car Jimmy Cobb, seul survivant, raconte comment ces séances se passèrent, ces dernières augmentées d’anecdotes surprenantes que le public ne connaît pas  Les analyses d’Herbie Hancock et de Ron Carter entre autres, sur Miles et ces  séances historiques sont plus que pertinentes  On y apprend aussi l’histoire de ce mythique studio, une ancienne église restaurée en studio par CBS, malheureusement aujourd’hui disparue!

Même si possédez déjà «Kind Of Blue» en cinquante autres versions, ce coffret est non seulement un total pur chef-d’œuvre musical certes mais également de remasterisation, de réalisation de livret, de photos, de DVD et de textes. Un vrai cadeau de Noël unique et intemporel !

Biographie de Miles Davis – repères biographiques

Miles Dewey Davis III est né le 26 mai 1926, Alton, dans l’Illinois.

Il commence la trompette à l’âge de 13 ans. Jeune prodige, il part à New York et intègre le quintette Charlie Parker en 1945. En 1948, il forme, avec le compositeur/arrangeur/pianiste/chef d’orchestre Gil Evans, un orchestre de neuf personnes dont le baryton Gerry Mulligan, le pianiste John Lewis, l’altiste Lee Konitz. Ils inventent une nouvelle forme musicale appelée « Cool ».

Ils enregistrent ensemble notamment « Birth of the Cool » (1949-1950), « Miles Ahead » (1957), « Sketches Of Spain » (1960). En 1957, Miles Davis se fait réellement connaître auprès du public européen en improvisant la musique du film « Ascenseur Pour l’Echafaud », film de Louis Malle, restant unique dans l’histoire jusqu’à ce jour!

Dès 1955, il forme un quintet avec le pianiste Red Garland, le bassiste Paul Chambers, le batteur Philly Joe Jones et le ténor John Coltrane. Cette formation est augmentée en 1958 avec l’arrivée de l’altiste Cannonball Adderley. Le place du piano sera partagée par Wynton Kelly et ou Bill Evans, ce dernier collaborant que pour quelques concerts et séances uniquement. Philly Joe cède sa place à Jimmy Cobb. Ce groupe découvre et invente le Jazz dit « modal » en produisant l’album.

« Kind Of Blue » en 1959, lequel sera considéré comme l’un des meilleurs de l’histoire du Jazz moderne.

Dans les années soixante, Miles rassemble de jeunes talents tels que le saxophoniste George Coleman puis Wayne Shorter, le bassiste Ron Carter, le pianiste Herbie Hancock. Il découvre le tout jeune batteur Tony Williams en 1963 alors qu’il n’avait que … dix-sept ans ! Attiré par la musique Rock et par le son du guitariste Jimi Hendrix, le trompettiste crée alors le « Jazz-Rock » ou nommé aussi « Fusion »en y incluant une nouvelle et avant-gardiste instrumentation électrique ainsi que de nouveaux venus sur cette scène tels que les pianistes Keith Jarrett, Chick Corea, le bassiste Dave Holland, les batteurs Jack DeJohnette, Don Alias,  le guitariste John McLaughlin etc. Il enregistre alors « In A Silent Way » puis « Bitches Brew » (1970).

Son talent et ses expérimentations font de lui une star mondiale. A chaque décennie, il découvre toujours de jeunes musiciens qui deviennent, à leur tour, non seulement de grands musiciens influents en matières musicales mais également des stars incontournables d’aujourd’hui.

Miles Davis meurt à Santa Monica, Los Angeles, Californie, le 28 septembre 1991.

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Article du 3 décembre 2008 par « Beethoven » Jean-Michel Reisser; 2 corrections le 5 décembre 2008.