Paris Art Déco

Avr 19, 2017 at 11:51 938

En octobre 1925, l’exposition internationale des arts décoratifs et industriels moderne de Paris ferme ses portes. C’est un immense succès populaire. Nul ne se doute que cette exposition va laisser son nom à un style emblématique et au retentissement mondial.

Emmanuel Bréon, le Président d’Art déco de France, explique dans le nouveau livre Paris Art Déco que ce style a été conçu peu avant la Première Guerre mondiale, que Paris n’est pas la première ville Art déco de France, car les cités telles que Saint-Quentin, Reims ou Lens devancent la capitale en adoptant d’urgence le nouveau style, mais que la France et Paris sont la source initiale d’inspiration de ce style universel.

Auteurs : Emmanuel Bréon (Président d’Art déco de France) et Hubert Cavanio ; photographies de Laurent Thion : Paris Art Déco. Somogy Editions d’Art, 2017, 240 pages avec 250 illustrations, relié sous jaquette. Commandez ce livre, qui est la source pour cette article, chez Amazon.frAmazon.com ou Amazon.de.

La couverture du livre montre un détail de l’immeuble d’habitation à la rue de la Cité-universitaire numéro 3 au 14e arrondissement (clic droit sur l’image pour une photographie haute résolution de la couverture).

Au début du 20e siècle, Paris doit faire face à une explosion démographique. Figée dans son habit haussmannien, la capitale a besoin d’un renouveau et voit surgir de nombreux immeubles Art déco, chics ou populaires.

Emmanuel Bréon et Hubert Cavanio expliquent — et Laurent Thion l’illustre avec des photographies de grand format — que l’intérêt et la beauté des réalisations Art déco, c’est le souci du détail. Les architectes de ce nouveau style travaillent avec les meilleurs ferronniers, mosaïstes, maîtres verriers, fresquistes et sculpteurs de leur temps. Dans le domaine des métiers de la décoration d’intérieure, les représentants de l’Art déco inventent le terme d’ensemblier, comme pour confirmer l’idée que l’architecture et la clef de voûte de tous les Arts.

Les auteurs de ce véritable beau livre soulignent que, pour embellir les ensembles, il ne s’agit pas de faire du placage sans fondement réel ou d’empiler les styles comme à la Belle Epoque, mais de souligner plutôt sobrement et discrètement les structures et de concourir ainsi à l’harmonie de la construction.

Adieu donc les contorsions de l’Art nouveau et ses fleurs exubérants au tiges enlacées qui font place à la droite parallèle, aux fruits et fleurs stylisés et géométrisés, sagement introduits dans des cadres bien délimités. Ces derniers sont carrés, rectangulaires, circulaires, losangées ou octogonaux, la forme Art déco la plus utilisée.

L’habitat chic ou populaire des années 1920 d’architectes tels que  Debat-Ponsan, Laprade, Mallet-Stevens et Pierre Patout sera souvent qualifié d’architecture paquebot. Certains construisent des immeubles résolument modernistes, tout en faisant appel à la sculpture décorative comme Joseph Marrast ou Léon Azéma.

Il y a des architectes qui surprennent, tels que Roger-Henri Expert, auteur des villas néoclassiques d’Archachon. A Paris, il réalise deux bâtiment Art déco tout à fait novateurs : l’école du groupe scolaire Küss aux 13e arrondissement et les atelier de l’Ecole nationale des beaux-arts, rue Jacques-Callot.

Emmanuel Bréon et Hubert Cavanio soulignent le fait que la plus grande présence de l’habitat Art déco se trouve sur la ceinture parisienne. La société des Habitations à Bon Marché, les fameuses HBM, lance pour une vingtaine d’années un programme colossal de constructions modernistes sur les anciennes fortifications de la capitale. Tous les grands architectes de cette période participeront à cette construction de grande ampleur du logement social.

Les auteurs nous parlent également des ministères, mairies, postes, lycées, écoles et casernes de pompiers Art déco. Ils mentionnent entre autres le groupe scolaire de la rue des Morillons de Pierre Sardou, agrémentés de frises d’enfants polychromes du sculpteur Henri Navarre, ainsi que l’école de la rue Küss de Roger-Henri Expert dessinée comme un paquebot transatlantique. Ce n’est pas étonnant, car il exécute la magnifique descente du grand escalier menant au fumoir et vers les somptueux salons et salles à manger du Normandie. Ils mentionnent également le siège de la toute nouvelle direction des Services téléphoniques à Paris, rue Vaugirard. Il s’agit du chef-d’œuvre de Jacques Debat-Ponsan. Chaque quartier parisien voit surgir un bureau de poste Art déco. Malheureusement, ils ont presque tous disparu.

Dans d’autres chapitres, on apprend que banques, entreprises, boutiques et grands magasins se mettent également au goût du jour ou plutôt de l’époque ; que restaurants, cabarets, théâtres, music-halls et cinéma suivent également la mode ; que les fontaines, jardins, piscines et autres lieux de récréations et sports ne s’y refusent non plus ; que l’Art déco rentre même dans l’église, notamment l’Eglise du Saint-Esprit au 186, avenue Daumesnil au 12e arrondissement et dans l’Eglise Sainte-Odile au 2, avenue Stéphane-Mallarmé au 17e arrondissement, pour ne nommer que deux ; que ateliers et fabriques suivent également.

Vers la fin du beaux-livre Paris Art Déco, Emmanuel Bréon et Hubert Cavanio mentionnent le musée permanent des Colonies comme un de plusieurs sommets d’excellence de ce nouveau style. Il est construit pour l’Exposition internationale de 1931. Confié à l’origine à Léon Jaussely, le musée permanent des Colonies est avant tout l’œuvre d’Albert Laprade, assisté de Léon Bazin. Nos auteurs décrivent l’architecture de ce palais comme le plus bel ensemble Art déco français, auquel ont participé de nombreux artistes importants, tels que Alfred Janniot pour la tapisserie de pierre située derrière la colonnade, Roger Ducos de la Haille pour les fresques du grand hall, Jacques-Emile Ruhlmann et Eugène Printz pour les ensembles mobiliers des deux salons d’angle, Jean Prouvé, Edgar Brandt et Raymond Subes pour les ferronneries, Gentil et Bourdet pour les carrelages et les mosaïques, et bien d’autres encore.

Musée permanent jusqu’en 1935, puis musée de la France d’outre-mer, il devient musée des Arts africains et océaniens en 1961 et enfin musée national des Art d’Afrique et d’Océanie en 1990, ce bâtiment, unique à Paris, accueille depuis 2007 la Cité nationale de l’histoire de l’immigration.

D’autres chefs-d’œuvre mentionnés par Emmanuel Bréon et Hubert Cavanio sont l’Hôtel Potocki, le Palais de Chaillot, la Mairie du 5e arrondissement à la place du Panthéon 21 ainsi que le Palais de Tokyo – Palais des musée d’Art moderne de Paris.

A la fin du livre se trouvent des détails au sujet de tous les immeubles Art déco mentionnés et photographiés. Il reste à souligner, qu’avant tout, Paris Art Déco offre des photographies de qualité ainsi que des textes courts, mais précis, qui nous permettent de redécouvrir un patrimoine architecturale et artistique de la capitale que la plupart des habitants et des visiteurs semblent ignorer jusqu’à ce jour.

Auteurs : Emmanuel Bréon (Président d’Art déco de France) et Hubert Cavanio ; photographies de Laurent Thion : Paris Art Déco. Somogy Editions d’Art, 2017, 240 pages avec 250 illustrations, relié sous jaquette. Commandez ce livre, qui est la source pour cette article, chez Amazon.frAmazon.com ou Amazon.de.

Pour faciliter la lecture, les citations du livre Paris Art Déco ne sont pas mises entre guillemets dans cette critique.