Iran, une histoire de 4000 ans

Juin 08, 2020 at 21:44 1734

L’histoire de l’Iran est mouvementée, ses terres ont été disputées, car le pays occupe une position clé au Moyen-Orient. Dans Iran, une histoire de 4000 ans (Amazon.fr), Yves Bomati et Houchang Nahavandi essaient de résumer la chronologie du pays, ses grandes dynasties, ses réussites et ses tragédies sur 413 pages.

Le premier chapitre à lui seul traite de la formation d’un nouvel espace politique et culturel. Les auteurs nous parlent des premières civilisations connues sur ce territoire. Nous y découvrons le royaume élamite et sa civilisation, les affrontements avec les royaumes mésopotamiens, l’immigration aryenne (venue du nord), l’arrivée des Indo-Européens, Cimmériens et Scythes, Mèdes et Perses, la genèse d’un empire, les croyances anciennes, Zarathoustra, le prophète réformateur ainsi que les pas vers la création de l’empire : des Mèdes aux Perses. Bref, le programme est vaste.

A partir d’un noyau modeste, la Médée et la Perse, ces derniers développèrent une culture et une civilisation différentes de celles de leurs voisins, contre lesquels les luttes de territoire, de pouvoir et de pensée furent constantes. Des idées aussi novatrices que le zoroastrisme, le rêve d’un empire universel régi par des lois de tolérance ou le partage des pouvoirs entre souverain et assemblées y naquirent en même temps que de grands courants philosophiques et artistiques.

Parallèlement, des conflits internes entre les pouvoirs régaliens et religieux en scandèrent le cours jusqu’aux dates les plus récentes. S’y ajoutèrent, dès le VIIe siècle, des chocs religieux entre un islam sunnite triomphant et des croyances préislamiques doublées d’un désir d’indépendance qui débouchèrent sur un chi’isme ébranlant le Moyen-Orient et participant à l’originalité d’un peuple capable de transformer une servitude en renouveau.

Encore quelques informations au sujet des autres chapitres : Yves Bomati et Houchang Nahavandi nous parlent au deuxième chapitre de Cyrus, Cambyse et Darius le Grand qui, lui, créa le plus grand empire de l’Antiquité. Ensuite, ils décrivent l’invasion arabe, la renaissance p0litique de l’Iran, l’invention du terrorisme politique par Hassan Sabbah et «les Assassins», pour conclure le troisième chapitre avec des lignes au sujet du «fléau» mongol. La quatrième partie du livre traite de l’âge d’or safavide avec la constitution du premier État chi’ite et avec l’invention d’une nouvelle gouvernance : la monarchie absolue de Shah Abbas Ier. A la fin, les auteurs nous parlent de l’héritage, de la décadence et de la chute des Safavides. La cinquième partie nous informe du défi iranien face à la modernité. L’empire est reconstitué dans le sang par Agha Mohammad Khan Qâdjâr. Ensuite viennent le long règne de Fath ‘Ali Shah, des années de stagnation, des lumières dans les ténèbres, des espoirs déçus et, à la fin, une analyse de la chute des Qâdjârs. A la fin du livre se trouve un petit chapitre au sujet du temps des bouleversements avec Reza Khan, Reza Shah Pahlavi et Mohammad Reza Pahlavi – à ce sujet à lire des mêmes auteurs : Mohammad Réza Pahlavi, le dernier Shah. Le livre se termine avec une conclusion au sujet de la révolution iranienne.

Yves Bomati et Houchang Nahavandi soulignent que la forte culture de l’Iran est restée, au travers des siècles, un de ses éléments structurants, définissant une « iranité » qui résiste à l’effritement du temps. Ce sont toutes ces composantes, alliées ou opposées, qui ont fait l’Iran d’aujourd’hui et préludent à l’Iran de demain que nos auteurs situent dans la géopolitique mondiale qui en découle.

Yves Bomati et Houchang Nahavandi ont croisé leurs regards français et iranien. Leurs sources, forcément différentes et multiples dans les langues qu’ils pratiquent, se sont révélées complémentaires. Ils nous décrivent les secrets et les ressorts de la continuité de l’histoire d’un si grand pays, de sa pérennité par-delà ses révolutions, révoltes ou soubresauts, ses choix civilisationnels et culturels.

Les auteurs pensent que l’histoire donne les clés du présent, éclaire une réalité contemporaine car peu de nations au monde ont connu autant de bouleversements territoriaux, politiques et religieux. Tant de fois, on aurait pu penser que l’Iran allait disparaître sous les coups des invasions, des massacres et des renversements de pouvoir. Le pays a parfois sombré, mais subsisté et est réapparu sur le devant chahuté de la scène internationale. Car les Iraniens ont une force : leur histoire qu’ils vivent toujours avec ferveur et dont ils évoquent les événements lointains comme s’ils étaient récents.

Dans leurs rapports avec l’Iran et les Iraniens, les Occidentaux, Américains compris, ont souvent été fascinés par un degré de civilisation qu’ils pensaient pouvoir ne trouver que chez eux. Or, s’ils ont beaucoup fantasmé sur ce qu’ils ont nommé à tort la Perse, qui n’est qu’un espace historique et constitutif de l’Iran. Selons nos auteurs, ils ont commis beaucoup d’erreurs… et continuent peut-être d’en commettre.

Yves Bomati et Houchang Nahavandi écrivent que l’Iran est un pays plurimillénaire dont les usages n’ont été connus que depuis le XVIIe siècle par une minorité d’Occidentaux, dont les choix religieux préislamiques restent à découvrir, dont les particularités du chi’isme duodécimain par rapport au sunnisme restent incomprises pour beaucoup et dont les relations mouvantes entre le régalien et le turban les laissent perplexes.

Yves Bomati, Houchang Nahavandi : Iran, une histoire de 4000 ans. Perrin, 2019, 413 pages. Commandez ce livre chez Amazon.fr. Par les mêmes auteurs : Mohammad Réza Pahlavi, le dernier Shah. A lire également notre article en anglais au sujet du roi d’Assyrie Ashurbanipal.

Pour faciliter la lecture, les citations et citations partielles dans cet article – entièrement basé sur le livre présenté – ne se trouvent pas entre guillemets. Critique de livre ajouté le 8 juin 2020 à 21:44 heure de Paris.